Exploitation du datacenter : quatre écueils à éviter

Les investissements à réaliser pour construire ou rénover un datacenter sont très importants. Pour pérenniser et rentabiliser cet actif, dont dépend la continuité de service de la production informatique, il convient de mettre en œuvre une exploitation rigoureuse et industrielle. Pourtant, il est fréquent de constater que les ressources et les efforts consentis pour l’exploitation des centres de données demeurent insuffisants. Quatre écueils à éviter.

Par: Tristan Richard, direction des opérations, APL

Une équipe réduite à sa plus simple expression

Qu’il s’agisse du foncier ou des installations techniques (électricité, refroidissement, sécurité), les entreprises investissent massivement pour construire ou rénover leurs datacenters. A l’inverse, elles sous-estiment fréquemment les ressources nécessaires à une bonne exploitation, en particulier le volet humain. S’appuyant généralement sur de la sous-traitance, depuis l’urbanisation des salles informatiques jusqu’à la maintenance multitechnique du bâtiment, l’équipe exploitante est souvent réduite au strict minimum avec un collaborateur sachant qui concentre un large spectre de compétences, couvrant à la fois l’IT (réseaux et matériels informatiques) et les infrastructures techniques du bâtiment, notamment l’électricité et le refroidissement. Polyvalent, il a la connaissance approfondie et l’historique du site. Mais que se passe-t-il lorsque cette personne, qui concentre toute l’expertise d’un datacenter, est absente ou quitte l’entreprise ?

A l’instar de la redondance des équipements, nécessaire pour résorber les points uniques de défaillance, le renforcement des équipes d’exploitation permet de réduire le risque pour les entreprises et constitue, à long terme, un investissement rentable. Ces profils « moutons à 5 pattes », capables à la fois de maîtriser l’IT et d’appréhender le bâtiment, ne sont toutefois pas faciles à recruter, du fait notamment du déficit d’image attaché à l’univers de l’exploitation des datacenters.

Une gestion non documentée et court-termiste

Gérer de façon efficace un datacenter sans procédures préalablement définies et sans historique précis des évolutions et des interventions réalisées est illusoire. Les outils, notamment de BIM (Building Information Management), malgré les promesses qu’ils apportent, se heurtent aux mêmes limites que la documentation traditionnelle : si, faute de temps et de ressources, les éléments de suivi de l’exploitation du datacenter ne sont pas mis à jour régulièrement, le résultat est le même. In fine, des procédures d’exploitation partielles et des interventions trop peu documentées reviennent à gérer le datacenter « à vue », en réaction aux urgences et incidents et conduisent à un maintien en conditions opérationnelles aléatoire.

Une communication insuffisante, une gouvernance peu formalisée

De par sa nature mixte, mêlant infrastructures technologiques et du bâtiment, le datacenter dépend de la responsabilité conjointe de la DSI et des services généraux ou immobiliers. Ce qui nécessite, a minima, une communication régulière et efficace entre ces différents services ainsi qu’une répartition claire de leurs responsabilités et périmètres d’intervention sur l’ensemble des processus (maintenance quotidienne, sécurité, protocoles de réponse en cas de dysfonctionnement ou de crise majeure).

La quasi-totalité des entreprises sont aujourd’hui « IT-dépendantes » et ne peuvent souffrir un arrêt momentané des services numériques. Aussi, lorsqu’un tel événement survient, c’est vers la DSI que les autres directions de l’entreprise se tournent même si le dysfonctionnement résulte d’un problème externe à l’informatique, touchant un élément du bâtiment, ses systèmes électriques ou de refroidissement par exemple. La mise en place d’un département responsable de la continuité de service de bout en bout des systèmes d’information, incluant la gestion du datacenter, constitue un modèle de gouvernance à privilégier.

Un datacenter décorrélé de la digitalisation du business

Le maintien en conditions opérationnelles du système d’information devient une nécessité impérieuse. Un datacenter hors-service, quelle qu’en soit la raison, c’est un système d’information inutilisable et donc un business, au mieux ralenti, si des procédures de fonctionnement en mode dégradé ont été prévues ; au pire, c’est un business à l’arrêt. La continuité de service du système d’information ne peut donc plus se limiter aux éléments IT. Elle doit désormais intégrer l’exploitation du bâtiment, au travers du suivi d’un certain nombre d’indicateurs (KPI). Le développement des objets connectés et la généralisation de l’intelligence artificielle devraient d’ailleurs, dans un très proche avenir, aider les entreprises à disposer de données encore plus fines pour industrialiser davantage les processus et améliorer la maintenance prédictive.

En d’autres termes, il est grand temps de rehausser l’exploitation des « couches basses » de l’infrastructure (bâtiment et IT) dans l’échelle des priorités de l’entreprise numérique, moins visibles mais aussi essentielles que les couches applicatives.

 

Auteur de l’article : Rédacteur externe

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