Huawei, Ericsson et Nokia s’affrontent sur le vRAN, réseau radio virtualisé

A l’occasion du prochain Mobile World Congress qui se tiendra du 26 au 29 février à Barcelone, les équipementiers télécoms affichent leurs plans de migration vers l’Open RAN/vRAN, pour tisser des réseaux radios plus ouverts, programmables et intelligents.

Les réseaux vRAN (virtualized Radio Access Network) sont des réseaux d’accès radio fondés sur des logiciels, API et standards ouverts. Ils offrent plus de souplesse et de choix aux opérateurs. Huawei, Ericsson et Nokia, les trois premiers équipementiers télécoms affrontent une concurrence accrue avec la percée d’acteurs tels que Fujitsu, NEC, Samsung, ZTE, et le français Rapid.Space.

Pour le patron de Rapid.Space Jean-Paul Smets, « la technologie vRAN fonctionne depuis plusieurs années et elle va remplacer les équipements traditionnels, avec des baisses de coûts importantes, comme cela se passe avec les sytèmes et logiciels libres. »

Selon le cabinet Dell’Oro Group, le marché RAN reste concentré sur huit fournisseurs représentant plus de 98% du marché en 2023, dont les trois leaders demeurent Huawei, Ericsson et Nokia.

Le marché vRAN, qui consiste à virtualiser les fonctions du réseau d’accès radio (RAN) sur des serveurs cloud, est encore émergent mais très prometteur.

Des challengers tels que Xilinx ou Mavenir proposent une unité radio MIMO massive compatible avec les spécifications Open RAN qui doit faire l’objet d’essais sur le terrain dans le courant de l’année 2024.

« Les nouvelles technologies, les nouvelles architectures et les nouveaux segments peuvent, dans certains cas, offrir des opportunités aux fournisseurs plus modestes. Cependant, le bilan des nouveaux entrants est loin d’être parfait, » note Stefan Pongratz, vice president, Dell’Oro Group.

Nokia mise sur l’automatisation de services avec Dell et Red Hat

Les réseaux 5G privés, détenus, exploités ou loués par des industriels ou par des zones d’activités d’entreprises privées (ports, aéroports, etc.) sont notamment en ligne de mire. Les clients de Nokia AirFrame, l’activité de centre de données de l’équipementier télécom, migrent vers des serveurs PowerEdge de Dell spécialement conçus pour exécuter les charges de applicatives des réseaux de télécommunications modernes. Le Digital Automation Cloud (NDAC) de Nokia devient quant à lui la plateforme privée sans fil de Dell pour répondre aux besoins de telles entreprises et collectivités.

Les deux partenaires cherchent à s’appuyer sur les plateformes NativeEdge de Dell et OpenShift de RedHat pour faire progresser les architectures de réseau ouvertes dans l’écosystème des télécommunications et multiplier les cas d’usage privés de la 5G et ultérieurement de la 6G, au sein des entreprises.

« Les opérateurs télécoms font des expérimentations actuellement pour évaluer les technologies de déploiement de services cloud du cœur de réseau, à ses extrémités (edge) et jusqu’aux réseaux vRAN / Open RAN. Ils veulent optimiser le coût de possession total (TCO), l’agilité et la fiabilité de nouveaux services,  » résume Andrew Vaz, VP of product management, Dell Technologies Telecom Systems Business.

Pour sa part, Ericsson propose un portefeuille complet de composants matériels et logiciels pour les réseaux 5G publics et privés. Membre de l’O-RAN Alliance, ainsi que de l’Open RAN Policy Coalition, un groupe d’entreprises qui plaide en faveur du soutien et de l’investissement des gouvernements dans l’Open RAN, Ericsson a retenu pour partenaires technologiques Cisco, HPE, Intel, Samsung et Xilinx.

La stratégie de Huawei en termes d’Open RAN/vRAN est plus ambiguë et controversée. D’un côté, Huawei affirme soutenir l’initiative Open RAN et participer à certains groupes de travail de l’O-RAN Alliance. De l’autre, Huawei critique ouvertement les performances, le bilan énergétique et la sécurité des solutions Open RAN, préférant promouvoir sa propre architecture RAN intégrée et propriétaire.

Huawei domine actuellement le marché RAN, mais de nombreux opérateurs européens cherchent à diversifier leurs fournisseurs et à remplacer les équipements Huawei pour des raisons de sécurité et géopolitiques.

L’adoption et le déploiement de l’Open RAN/vRAN se heurtent encore à plusieurs défis et à plusieurs obstacles sur le terrain, dont :

  • La maturité de la technologie : L’Open RAN reste relativement nouveau et évolutif. Il doit confirmer son interopérabilité avec les infrastructures et services de réseau en place. D’où l’importance des tests et PoC menés actuellement chez les opérateurs de télécommunications.
  • Les risques de sécurité : L’Open RAN introduit plus de complexité et de variété dans le réseau, ce qui augmente la surface d’attaque et la vulnérabilité des réseaux aux cybermenaces. En outre, il s’appuie sur des composants définis par logiciel hébergés dans le cloud, ce qui peut poser des problèmes de sécurité ou de mise en conformité.
  • Les coûts : L’Open RAN peut réduire les dépenses d’investissement (CAPEX) en équipements réseau grâce au vaste choix de serveurs et d’équipements standards possibles. Cependant, il peut aussi augmenter les dépenses opérationnelles (OPEX) de supervision et de maintenance du réseau en exigeant davantage d’intégration, d’essais et de dépannage de solutions multifournisseurs. Les opérateurs de télécommunications doivent donc trouver un équilibre entre les coûts et les avantages à court et à long terme de l’Open RAN.

Auteur de l’article : la Rédaction

Journaliste et fondateur de l'agence éditoriale PulsEdit, Olivier Bouzereau coordonne la communauté open source OW2, conçoit des services et contenus en ligne, des conférences et formations pour les professionnels du numérique, des médias et de la santé. Profil LinkedIn.